Covid-19 : au Mali, vaincre aussi la pandémie des fake news
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Covid-19 : au Mali, vaincre aussi la pandémie des fake news

La progression au Mali du taux de contamination liée à la pandémie de Covid-19 s’explique, pour les spécialistes, par l’attitude des sceptiques, qui se fient surtout aux fake news circulant sur les réseaux sociaux et négligent même les mesures barrières.

Cet article a d’abord été publié, en avril 2021, par le journal L’Annonceur.

« Il y a énormément de désinformations sur la Covid-19 au point que certains ne croient pas à l’existence même de la maladie », se désole Alioune Gueye, président d’une association [RENAJEM], patient guéri. « Je dis qu’elle existe et le pays compte plus de 10 000 personnes infectées, plus de 50 000 dans certains pays voisins, des millions de malades et de morts à travers le monde, ce qui n’est pas négligeable », poursuit-il. Et d’ajouter : « On a eu beaucoup de personnalités qui sont décédées du fait de la Covid-19 au Mali. Il faut juste savoir que cette maladie se manifeste différemment d’un pays à un autre, d’un continent à un autre, d’une personne à une autre. Mais, cela ne veut pas dire qu’elle n’existe pas. ».

Le coordinateur du comité scientifique du ministère de la Santé et du Développement social, professeur Akory Ag Iknane [il a quitté son poste en mai 2021], est catégorique : « Ce sont les journalistes. C’est vous qui publiez, vous êtes partie prenante. La population n’a aucun moyen de se mettre à l’abri, parce qu’il y a des gens qui prennent pour argent comptant tout ce qu’ils lisent. Idem pour une frange de la population qui croit à tout ce qu’elle entend. C’est aux autorités de démentir. Souvent même si elles le font, c’est trop tard ».

Partager sans vérification

En ce qui l’origine des fake news sur le coronavirus, Abdoulaye Guindo, journaliste et blogueur, ne partage pas l’avis d’Akory Ag Iknane. Pour lui, les journalistes sont accusés à tort et ne sont pas ceux qui « fabriquent les fausses informations sur la cette maladie ». « La Covid-19 a un enjeu économique. Ce sont les multinationales qui se font la guerre. Par exemple, si elles affirment que le vaccin AstraZeneca n’est pas bon et que tel autre est bon, est-ce que ce sont les médias qui sont à la base de cette affirmation ? Ce qu’on peut leur reprocher, c’est le fait qu’ils diffusent, partagent sans vérification. Ce qui est un manque de professionnalisme », précise-t-il.

Au Mali, si les fausses informations prennent de l’ampleur, c’est parce que les autorités n’ont pas une politique de communication d’anticipation. C’est seulement lorsque circule une fausse information, remarque Abdoulaye Guindo, qu’elles sortent pour démentir.

Il est à noter qu’au-delà de créer des sceptiques au sein de la population, les fausses informations peuvent avoir des effets dramatiques. « Les personnes qui partagent les fausses informations font les mêmes pratiques que les terroristes, en ce qu’elles peuvent compromettre les efforts des autorités, des médecins qui travaillent pour soigner les malades afin de contrer la maladie. Ça peut aller jusqu’à mettre en danger la vie des personnes », souligne Lassine Niangaly, du site malien de vérification des fake news lejalon.com. Il ajoute : « S’il s’agit d’une information sur la maladie à coronavirus, l’idéal serait de contacter les services de santé et au cas où c’est une vidéo, photos sur la maladie, on n’a pas mal d’outils de vérification. »

Nouvelle stratégie

Au Mali, pour faire face aux rumeurs et désinformations sur la maladie à coronavirus, le pays dispose d’une unité de gestion dédiée. C’est du moins ce que nous a appris Souleymane Traoré, chef du département animation, suivi et évaluation du Centre national d’information et de la communication pour la santé (CNIECS) dans une précédente communication. Selon lui, « cette unité, composée des départements clés et des partenaires techniques et financiers comme l’Unicef et l’OMS, analyse les rumeurs récoltées par l’antenne (centre d’appel téléphonique), traite et pose l’action. »

Ensuite, la charge revient au CNIECS de transformer en messages qui sont diffusés sur les médias. Mieux, a-t-il ajouté, une nouvelle stratégie en cours d’élaboration, basée sur « les influenceurs », va consister à suivre les médias et donner une réponse directement en cas de rumeurs ou de désinformation.


  • « Ce reportage est publié avec le soutien de JDH/JHR- journalistes pour les Droits Humains et Affaires Mondiales Canada »

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