Kéniéba : la société civile vent debout contre la pollution du fleuve
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Kéniéba : la société civile vent debout contre la pollution du fleuve

Conduite par l’Association Wassa-Ton, la société civile du Mont Tambaoura a marché le mardi 16 mars 2021. Elle demande l’arrêt des activités polluantes sur le fleuve Falémé.

Des voix se font de plus en plus entendre sur la pollution du fleuve Falémé et les cours d’eau du cercle de Kéniéba, dans la région de Kayes. Face à la dégradation du nid du fleuve, qui sert de frontière naturelle entre le du sud-ouest du Mali et le Sénégal, les populations de cette zone minière expriment leur désarroi. Et pointent l’orpaillage clandestin, notamment le dragage.

Les acteurs de la société civile, conduits par l’association Wassa-Ton, ont haussé le ton le 16 mars 2021 en organisant une marche pacifique pour dénoncer ces activités de pollution et de dégradation de leur environnement.

Cri de cœur

« Nous ne resterons plus silencieux sur la gravité de la situation environnementale qui frappe de plein fouet le cercle de Kéniéba », avertit la société civile, qui accuse des « ressortissants chinois et burkinabé » d’être à la base de leur malheur. Ils dénoncent leurs méthodes d’extraction de l’or : ces exploitants utilisent des produits chimiques tels que le mercure, le cyanure, entre autres.

« L’utilisation de produits chimiques cause d’énormes déboires de santé, a alerté Mamadou Dabo, président de la société civile de Kéniéba lors de ladite marche. Ils emploient de nouvelles techniques d’orpaillage qui sont dangereuses pour notre santé ». Selon lui, il faut que les autorités au sommet de l’État entendent le cri de cœur des populations qui commencent à prendre conscience de la gravité du phénomène.

En accueillant les manifestants, le préfet du cercle, Idrissa Kané, a tenté d’apaiser en expliquant à ses interlocuteurs qu’il a pris bonne note de leurs doléances. Il leur a aussi promis de transmettre ces revendications à qui de droit, afin de trouver des solutions durables à la crise.

Que reste-t-il à sauver encore ?

Keita est environnementaliste et natif de Kéniéba. Il mène depuis des mois, aux côtés de la société civile de sa localité, une lutte pour obtenir la fin des activités dites « illégales » sur le fleuve Falémé, qui n’existerait aujourd’hui que de nom. « Si la réponse tarde encore, l’agriculture disparaîtra, car les terres cultivables sont polluées dans plusieurs localités et les semences ne résistent pas aux produits chimiques utilisés au mépris des toutes les règles en la matière », a précisé cet expert.

Cependant, quelques questions restent pour l’heure sans réponse. Aux yeux de beaucoup d’observateurs, malgré l’interdiction des travaux de dragage sur les fleuves, les actes de pollution continuent au grand dam des habitants et des autorités locales. « Qui autorise donc l’exercice de ces activités bien qu’elles soient interdites par l’arrêté interministériel du 15 mai 2019 ? », s’interroge un confrère sur place, à Kéniéba.

Il faut souligner que ces produits seraient à la base de beaucoup de maladies (maux de ventre, diarrhée, problèmes respiratoires…). Une opération de sauvegarde de la Falémé a été lancée pour stopper les activités. Malgré une saisie importante de plusieurs machines, les activités continuent en toute impunité.

Parler de la même voix

L’une des grosses difficultés à laquelle le front contre l’orpaillage par dragage fait face est la division. Certaines sources rapportent même que les populations de ces zones aurifères sont divisées sur la présence des exploitants dans leurs localités. Ceux qui se sentent lésées croiseraient le fer avec ceux qui collaborent clandestinement avec les exploitants et d’autres opérateurs miniers.

En effet, une partie défend cette pratique. Elle met en avant le gain des populations de cette localité reconnue autrefois comme une région agricole. Alors que les acteurs de la lutte contre la pollution du Falémé mettent en avant la pauvreté croissante des populations. « C’est difficile d’en parler, mais la vérité est qu’il n’y a vraiment rien qui puisse permettre aux populations de subvenir à leurs besoins. S’ils ne donnent pas leurs champs aux orpailleurs, comment pourront-ils abréger la souffrance financière au niveau des familles », s’interroge un habitant.

Au sein de la société civile, il y a un fossé. Les acteurs ne parlent pas le même langage. Pendant que certains militent pour l’arrêt des activités d’orpaillage qui polluent l’environnement et les cours d’eau du cercle de Kéniéba, d’autres, qui tirent profit de cette activité, mènent par contre des actions de sabotage.

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