Révolu pour certains, accessoire pour d’autres, la capacité de la femme à bien cuisiner, est au cœur des équilibres et déséquilibres familiaux dans notre pays.
Les hommes attachent-ils de l’importance à l’art culinaire, au moment de choisir leurs épouses ? Nos jeunes sœurs apprennent-elles à bien cuisiner avant de rejoindre leurs belles familles ? Quid de la transmission mère-enfant des secrets culinaires ? Ces questions rappellent combien notre société reste encore attachée à la gastronomie comme critère de mariage.
« Aujourd’hui, si tu épouses une femme, il faut engager une aide-ménagère pour l’accompagner », affirme Oumou Dembélé, une quinquagénaire. C’est l’une des principales tâches pour lesquelles les jeunes mariées font recours aux bonnes, qu’elles soient actives ou pas sur le plan professionnel.
Satisfaire le ventre d’abord
Modibo Koné relate l’histoire de son ami qui a fini par prendre comme seconde épouse, l’aide-ménagère de la famille. « Mon ami était obligé d’acheter de la nourriture au-dehors pour la maison. Sa femme ne savait pas faire la cuisine », raconte-t-il. Lorsque le couple a employé une bonne qui savait bien cuisiner, le foyer s’est effondré. Car la première femme ne supportant pas de partager son homme avec son aide-ménagère, a demandé le divorce.
Mamou Samaké, sexagénaire et conseillère conjugale, explique que la femme doit s’attacher à satisfaire son mari par le ventre et le bas-ventre. « Malheureusement, de nos jours, nos filles maîtrisent les astuces pour la satisfaction du bas-ventre, mais ignorent tout des secrets culinaires. Et cela finit par leur coûter énormément de points dans le mariage », déplore-t-elle.
Des solutions à portée de main
Pour Rokia Diarra, une belle-mère, les jeunes femmes manquent aussi d’humilité : « j’ai trois fils qui se sont déjà mariés. C’est moi qui ai tout appris à mes deux premières belles-filles. Quand elles arrivaient ici, dans la famille, elles ne connaissaient pas grand-chose de la cuisine. Je les ai formées, aujourd’hui elles sont devenues des cheffes cuisinières », confie-t-elle avec fierté.
« Quand une femme n’est pas orgueilleuse et ne fait pas de sa belle-mère son ennemie, elle peut apprendre beaucoup de choses », soutient l’un de ses fils.
« Nos mères ont également démissionné. Dans les familles, elles préparent elles-mêmes à manger sans y impliquer véritablement leurs filles. C’est de là que tout commence pourtant », estime la vieille dame.
« Rares sont les familles à Bamako où les jeunes filles savent déjà très bien préparer à 18 ans. Cela est dû aussi au fait que peu d’hommes accordent de l’importance à la cuisine pour le choix de leurs épouses », conclut Mamou Samaké.