Parler de violences basées sur le genre dans les lycées de jeunes filles peut paraître assez bizarre voire inimaginable : il s’agit d’un établissement scolaire exclusivement dédié aux filles. Au Lycée Ba Aminata Diallo de Bamako, l’un des deux établissements scolaires de jeunes filles dans la capitale malienne, il existe des mesures de prévention.
Les violences basées sur le genre décrivent tout acte de violence sexuelle, physique ou psychologique. Elles peuvent survenir à l’école, à la maison ou ailleurs dans la communauté. Parler de ces types de violences en milieu scolaire fait référence à des cas d’agressions à l’encontre d’un(e) élève : lui faire du mal, l’humilier, etc. Ou encore empêcher ou interdire à une fille d’aller à l’école, pensant que sa place se trouve uniquement à la maison. Mais aussi obliger un(e) enfant à abandonner ses études pour se marier ou travailler : une forme de violence basée sur le genre, parmi tant d’autres.
Au Lycée Ba Aminata Diallo (LBAD), 80% des enseignants sont des hommes pour un total de 1300 filles, âgées de 13 à 17 ans, à en croire Mme Maïchata Bengaly, proviseure. Du côté des enseignants, on peut peut-être parler de violences surtout verbales, renseigne la responsable de l’établissement. En dehors les injures, la VBG vient généralement de dehors. Les contraintes d’abandon, les mariages forcés, entre autres.
« Cela marche ! »
L’une des premières mesures mises en place est la sensibilisation, qui commence par les encadreurs. L’administration, composée des femmes, a mis en place un cadre de concertation à cet effet. Dès la rentrée, des dispositions sont prises : « Lors des rencontres, nous demandons aux enseignants de faire attention à ces filles-là, aux violences verbales surtout qu’il faut éviter. Nous disons aux professeurs, si par hasard une fille vous manque de respect, sachez raison garder, venez à nous. Nous saurons gérer », explique Madame Bengaly.
La sensibilisation porte aussi sur le sujet des menstrues. Cela, pour éviter, par exemple, des cas de refus d’accès à la classe quand une fille ayant ses règles sort sans demander la permission par honte de devoir expliquer la raison. Et jusque- là, « cela marche ! », rassure-t-elle.
En dehors de l’école, il est évident que ces élèves « subissent des cas de violences », reconnait-elle. « Certaines sont contraintes d’aller dans les mariages malgré elles-mêmes. Tant bien que mal, elles tiennent à leurs études. Elles ne peuvent même pas suivre les cours parce qu’après quelques mois de mariage elles tombent enceinte. Et les parents ne viennent pas déclarer cela. Elles passent pratiquement trois mois ainsi à la maison. C’est quand la fille accouche qu’elle déclare avoir été malade pendant son absence ou tout simplement qu’elle n’était pas là. » Dans bien de cas, la déclaration est toujours faite en retard, voire après les évaluations à la demande de l’élève.
L’administration ne peut agir que quand le problème est ramené à l’école. « C’est quand elles viennent à nous qu’elles nous expliquent souvent », précise Mme Bengaly. Dans ce cas, l’administration est « obligée » de chercher une solution pour « ne pas pénaliser la fille ». Si c’est pendant le premier trimestre, il est demandé aux parents de fournir des documents justifiant l’absence. Il s’agit donc d’une mesure prise pour donner une « seconde chance ». Une des mesures est donc l’assistance. Aux enseignants qui sont à leur première prise de service, il est carrément rappelé : « Vous êtes en face des filles. Il y a une démarche qu’il faut suivre. Si vous pouvez dans la mesure du possible, aidez-les ».
Une formation spécifique
Pour renforcer ces mesures, il serait mieux de mettre en place un bureau de conseil pour ces filles elles-mêmes. Ces adolescentes ont souvent besoin d’écoute, de soutien pour des problèmes d’intégration pour faire régner la discipline. En général, ce sont les filles et femmes qui sont victimes de violences basées sur le genre. Mais, « la tendance est à l’envers. Ce sont elles qui sont souvent agressives envers les professeurs. Ils ont peur d’elles », poursuit la proviseure pour rappeler notamment que les VBG concernent et les hommes et les femmes. Les deux peuvent en être victimes à des degrés différents.
Une formation spécifique est nécessaire pour les enseignants. Compte tenu du rôle important des enseignants dans le processus éducatif et de la position unique de confiance qui est la leur, il est primordial qu’ils comprennent mieux les implications spécifiques de VBG à l’école. Sans oublier les élèves elles-mêmes.
Pour Mme Bengaly, il est important de les impliquer dans des activités comme les 16 jours d’activisme et la Journée internationale des droits de la jeune fille. Qu’elles-mêmes comprennent ces notions. Les enfants survivant(e)s de violence ont besoin de soutien et de compréhension. Il est nécessaire donc d’être à l’écoute et sensible à leurs besoins, mais aussi de faire de son possible pour les soutenir et les aider à se rétablir.