« Au nom du thé, du sucre et du grin » d’Issouf Koné est une pièce de théâtre d’éveil de conscience, notamment pour la jeunesse face à la démagogie des politiques, qu’il faut lire ou relire en cette période transitoire.
Le théâtre, dit-on, est le miroir de la société. Il sensibilise, éduque, pousse à l’autocritique et à un éveil de conscience. Au nom du thé, du sucre et du grin (Innov Éditions, 2018) d’Issouf Koné, préfacé par l’ancien premier ministre Moussa Mara, met en scène notre société sous un angle assez interpellateur : l’achat des consciences lors des campagnes électorales.
La pièce de 68 pages, soit 1h 15 minutes sur scène, est une immersion dans le « grin », ce groupe informel de discussion autour du thé. Celui qu’Au nom du thé, du sucre et du grin propulse sur la scène théâtrale regroupe trois jeunes diplômés sans emploi, ayant du mal à s’acheter le thé, l’élément clé du « grin ». Cette situation les pousse à réfléchir à différentes stratégies pouvant leur permettre de s’en sortir.
Promesses chimériques
L’immigration clandestine, le vol, la musique, le football sont autant de pistes que les deux jeunes, Alou et Moussa, envisagent d’explorer pour leur salut dans un pays où la mal gouvernance, le chômage, la corruption freinent le développement. Ils ne veulent surtout pas entendre le mot « enseignement » comme alternative proposée par Awa, la cousine de Moussa. Aller vers l’eldorado au péril de sa vie, intégrer l’armée dans le but de s’adonner au braquage de paisibles citoyens ou faire du rap (même sans talent) sont plutôt des raccourcis de réussite qui tentent les jeunes.
Devenir enseignant ? Les conditions des enseignants maliens n’encouragent pas à faire ce choix. « C’est horrible l’enseignement au Mali », « […] On est incapable de s’offrir ne serait-ce qu’une petite demeure pour abriter sa maisonnée », dit Moussa qui refuse également les travaux champêtres malgré les sollicitations de sa mère Nanan. La facilité avec laquelle des jeunes veulent réussir font d’eux une proie facile pour les politiciens, qui en profitent lors des élections au moyen de quelques billets de banque ou de promesses chimériques dans l’unique but de se faire élire.
Contribuer au « renouveau » du Mali
Cette pièce met en évidence la naïveté de la jeunesse, qui se fait embobiner par les politiques motivés uniquement par le pouvoir. L’exemple du candidat Bélé en est une illustration parfaite : construction d’une villa pour chaque tête du village, une ligne de métro, une usine de thé avec deux directeurs, Moussa et Alou, un moulin pour chaque femme du village sont, entre autres, des actions de son programme de campagne utopique.
Son challenger, Kassoum, le candidat « réaliste » dont le programme s’articule pourtant autour d’actions concrètes et réalisables de développement comme le redressement du système éducatif, la scolarisation des filles, la santé, la construction de salles de classe et des forages pour faciliter l’accès à l’eau potable perd les élections.
Le constat est amer et invite chaque citoyen, notamment les jeunes, à un éveil de conscience en période électorale. Les Maliens doivent s’approprier cette pièce en cette phase de transition dont le leitmotiv est le « renouveau » du Mali. Au nom du thé du sucre et du grin s‘inscrit dans cette démarche et joue déjà sa partition à travers l’initiative 1000 jours en création de l’association Culture en partage, avec 6 présentations effectuées au mois d’octobre 2020 dans des espaces publics de différents quartiers de la capitale avec plus 6 000 personnes touchées.
Le metteur en scène de la pièce, Levis Togo, prévoit une tournée à l’intérieur du pays, notamment dans les zones rurales. Ces différentes présentations se feront en bamanankan et, probablement, en d’autres langues nationales afin que le contenu soit accessible à toutes les populations pour un éveil de conscience en vue des prochaines élections.
Sérieux Youssouf, il n y a personne d’autre pour recenser ton propre ouvrage ? Fallait me l’envoyer.