La rentrée scolaire n’est pas effective partout au Mali. Si certains enfants vont à l’école, d’autres en sont privés à cause de l’insécurité dans le centre et le nord.
Le mois d’octobre marque d’ordinaire la rentrée scolaire au Mali, sur toute l’étendue du territoire après trois mois de vacances scolaires. Toutefois, l’observateur averti de la scène sociopolitique malienne n’est point dupe sur la réalité que vivent au quotidien les élèves, les parents d’élèves, le corps enseignant et l’administration scolaire depuis la soi-disant rentrée scolaire. Ainsi, pendant que les autorités en charge de l’éducation célébraient en grande pompe le retour du monde scolaire à l’école, sous les caméras, dans les grandes villes du pays, loin des zones sous contrôle des terroristes, des milliers d’enfants du Centre et du Nord se trouvent privés de leur droit fondamentaux, à cause de la crise sécuritaire.
Dans une telle situation, témoignant de l’extrême faiblesse du dispositif sécuritaire de l’Etat malien et du niveau timide et indécis d’accompagnement de la communauté internationale face à la puissance guerrière des forces terroristes, ces élèves des zones de conflits restent pour la plupart très nostalgiques de l’école. Ils arrivent à peine à se souvenir du cahier et de l’ardoise, empruntant ainsi le triste chemin de la déscolarisation forcée.
Les rêves brisés
Le nombre d’écoles, surtout au Centre et dans le septentrion du Mali, mais aussi dans une moindre proportion dans le Sud (région de Koulikoro) est assez illustrative de cette situation chaotique. Par exemple, de 2012 à nos jours, pour des raisons d’insécurité, le Centre d’animation pédagogique (CAP) de Douentza a enregistré au moins 125 écoles fermées sur un total de 210, selon Hamadoun Cissé, directeur d’école à Douentza.
A la faveur de l’occupation des régions du nord du Mali, suite à l’éclatement de la crise sécuritaire multidimensionnelle de 2012, la ville de Douentza, chef-lieu d’un des huit cercles qui composent la région de Mopti, située sur l’axe Sévaré-Gao et point de carrefour des axes Douentza-Tombouctou et Douentza-Gao, est tombée dans l’escarcelle des forces terroristes-djihadistes d’occupation pendant de longs mois.
Les redéployés et les déserteurs
Cette situation sécuritaire a créé deux types d’enseignants. Il y a d’abord ceux redéployés dans d’autres écoles du Centre d’animation pédagogique, pour prêter main forte aux enseignants titulaires débordés par le nombre pléthorique d’élèves dans les classes dû au déplacement massif de populations de l’intérieur vers le chef-lieu du cercle.
A Douma, dans la commune rurale de Kéréna, située à quelques 12 kilomètres de Douentza, il y avait 3 écoles dont une, mobile. « Toutes ont été fermées définitivement en 2016 pour des raisons d’insécurité », confie le directeur d’école de Douma, redéployé lui-même à Douentza. « J’ai abandonné mon école parce que les groupes djihadistes ont saccagé et brûlé mon bureau et je ne me sentais plus en sécurité. Ils ont frappé un jeune qu’ils croyaient être moi », témoigne Hama Diallo, directeur d’école.
A la différence des enseignants redéployés, il y a ceux qui ont fait de cette crise une porte de sortie pour ne plus toucher à la craie. Si Hama Diallo a été redéployé, d’autres enseignants comme Youssif Maïga de l’école de Boundikoli, dans la commune de Débéré, ont pris la poudre d’escampette et ne souhaitent plus retourner dans leur zone de service. Il n’a plus remis les pieds depuis 2012 dans l’enceinte de son école. « Même le maire principal (paix à son âme) un élu de la communauté, en son temps, n’y a plus mis les pieds. Qu’est-ce que j’irai faire là-bas ? », déclare-t-il pour tenter de justifier son abandon de poste.
La situation au Centre a aussi poussé beaucoup d’enseignants à abandonner leur poste à cause des attaques ciblées. Ce problème mérite une solution urgente appropriée de la part des plus hautes autorités du Mali.