La double crise sanitaire et sociopolitique qu’a connue le Mali ces derniers mois a fortement touché nombre de secteurs. Un coup dur a été porté au secteur du bétail, qui peine à se relever.
Cette situation a durement éprouvé les éleveurs faisant la navette entre le Mali, la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso. Ces deux pays ne peuvent se passer du cheptel malien qui est le plus important de la sous-région après celui du Nigeria.
Les exportations de bêtes vers la sous-région ont connu des perturbations à cause des sanctions imposées de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) contre le Mali. Même si les frontières sont rouvertes, le commerce extérieur n’a pas encore retrouvé son rythme habituel, notamment dans le secteur du bétail où les éleveurs peinent à juguler la conjoncture.
Le marché à bétail de Niamana est le plus grand de Bamako. Tous les éleveurs venant de l’intérieur du pays y convergent pour vendre leurs bêtes, soit aux bouchers maliens ou aux négociants étrangers. Cette activité emploie de milliers de personnes.
Inquiétude
Le parc à bétail de Niamana, communément appelé « Garbal », est bien approvisionné, mais seuls des clients locaux s’y bousculent, signe d’un non-retour à la normalité. Lors de notre passage le mois dernier, nous y avons aperçu des camions le long de la route menant à l’entrée principale du parc. Des éleveurs assis à même le sol, visages crispés, laissant apparaitre une inquiétude : beaucoup ont du mal à aller vendre à l’extérieur à cause de l’effondrement de leurs bourses, nous avaient-ils confié. La plupart se contente des marchés nationaux.
Avant la crise, les éleveurs se rendaient directement au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire sans passer par Bamako: « Beaucoup de mes collègues ne peuvent plus aller vendre leur bétail dans la sous-région depuis la fermeture des frontières. Ils sont contraints de venir à Bamako vendre à des prix bien en deçà de ceux habituellement connus», confie Almoustapha Kamian, commerçant de bétail au marché de Niamana.
Cette crise a eu des répercussions sur le secteur. Certains contractent même des dettes qu’ils promettent de rembourser lorsque la situation se normalisera. Mais, dans cette activité, personne ne peut prédire une stabilité économique parce que la clientèle est mouvante. « Nous pouvons faire de bonnes affaires aujourd’hui et tout perdre demain », explique Almoustapha.
Reprise lente
Avec la levée de l’embargo, les nouvelles autorités ont pris contact avec les éleveurs, leur donnant des assurances quant à leur détermination à créer les conditions nécessaires à la reprise de l’activité. « Le gouvernement de transition nous a assurés qu’il fera le maximum pour aider à la reprise rapide du transport de bétail vers la sous- région. Aujourd’hui, ce qui nous importe le plus, c’est le retour à une stabilité pour permettre de régler les dettes contractées », affirme Ali Niangadou, président du comité de gestion du parc à bétail de Niamana.
A ce jour, nous constatons une reprise timide du transport du bétail vers la Côte d’Ivoire, principale destination du cheptel malien. La liaison avec le Burkina Faso peine aussi à reprendre à cause de difficultés sur le plan sécuritaire.
Les éleveurs jouent un rôle important dans l’essor économique du pays. C’est un secteur dynamique qui profite tant aux acteurs qu’aux autorités nationales. Les autorités doivent envisager des stratégies d’accompagnement des commerçants de bétail affectés par la crise économique due à la Covid-19 pour éviter l’effondrement du secteur.