Les cas de disparition de personnes se multiplient depuis plusieurs années au Mali. Pourtant, les termes employés prêtent souvent à confusion. Nous repartageons un article publié il y a dix ans dans le journal « Procès-verbal », qui s’était entretenu à l’époque avec Aliou Badra Nanacassé, magistrat et actuellement membre du Conseil national de transition.
Régulièrement, des personnes ne donnant pas signe de vie sont annoncées comme portées disparues par leurs proches. Le terme « porté disparu » est abusivement utilisé, il est pourtant régi par la loi au Mali. Nous avons ainsi décidé d’en savoir plus sur ce que la loi dit sur le porté disparu et son héritage. Qu’est-ce qu’un porté disparu ? Que dit la loi civile de la gestion de ses biens ? Voici autant de questions que nous avons posées à un spécialiste du droit.
Selon, Aliou Badra Nanacassé, magistrat et actuellement conseiller au Conseil national de transition (CNT), la disparition est réglementée au Mali par la loi N°087 du 30 décembre 2011, à travers le code de la famille et des personnes. De cette loi, aux dires de Nanacassé, deux notions se dégagent : la notion d’absence et celle de disparition proprement dite.
La présomption d’absence et l’absence proprement dite
En ce qui concerne l’absence, Aliou Badra Nanacassé dit qu’elle est repartie en deux notions : la présomption d’absence et l’absence proprement dite. Au terme de la loi, il y a présomption d’absence quand un individu cesse de paraitre à son domicile connu depuis plus de trois ans. Cette présomption d’absence doit faire l’objet d’une déclaration au tribunal civil du dernier domicile connu du présumé absent par toute personne qui y a intérêt (épouse, enfants, collaborateur etc.).
Cette déclaration sera ensuite communiquée au procureur, qui ouvrira une enquête. Si au bout de l’enquête, le présumé absent reste introuvable, le président du tribunal peut désigner un ou plusieurs parents ou alliés, ou, le cas échéant, toute autre personne pour gérer tout ou une partie de ses biens, y compris exercer la tutelle sur ces enfants mineurs. Cependant, les personnes désignées peuvent être remplacées par le juge si elles ne gèrent pas convenablement les biens du présumé absent.
Si trois autres années passent sans que le présumé absent ne reparaisse, on parle maintenant d’absence proprement dite. Une déclaration d’absence est introduite toujours auprès du tribunal du domicile de l’absent. Le parquet, auquel la déclaration est transmise, ouvre une enquête supplémentaire. Si cette enquête ne permet pas de retrouver la personne déclarée absente, le président du tribunal rend un jugement déclaratif d’absence. Cette déclaration sera transcrite dans le registre d’état civil, avec le même effet qu’un acte de décès. C’est seulement après ce jugement déclaratif d’absence que la porte est ouverte à la succession : le partage de l’héritage aux ayants droit, la constatation du divorce etc. Et si la personne déclarée absente réapparaissait ? Le magistrat dira qu’elle pourra récupérer ses biens sauf ceux partagés. Quant au divorce, il reste consommé.
La disparition
Selon la loi, le disparu est la personne qui a cessé de paraitre à son domicile suite à des événements de nature à mettre sa vie en danger (tremblement de terre, inondation, bousculade etc.), alors que même son corps n’a pas été retrouvé. Au sujet de la disparition, Aliou Badra Nanacassé explique que la disparition peut être déclarée par requête du procureur de la République ou par toute autre personne intéressée, peu importe le lieu de la disparition. Si le tribunal estime que le décès n’est pas confirmé, il peut demander un complément d’information. Ensuite, il est rendu un jugement de déclaration de décès qui est applicable à tous. Cet acte, qui est transcrit dans l’état civil, a valeur d’acte de décès.
« A partir de cet instant, la succession du disparu est ouverte. L’héritage est partagé en fonction de la coutume des intéressés », explique Aliou Badra Nanacassé. Si le disparu réapparaissait, le procureur de la République, l’intéressé ou tout individu pourrait poursuivre l’annulation du jugement.
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