La situation sécuritaire à Fana va de mal en pis. Les populations, révoltées à cause des crimes répétitifs, réclament un commissariat dans de brefs délais.
« Fana n’est plus une petite ville : elle est assez grande », laisse entendre Bourama Sanogo, conseiller du chef de village. Véritable carrefour entre trois villes principales, Dioïla, Ségou et Bamako, Fana, arrondissement situé dans la région de Koulikoro, est devenue une ville qui fait de plus en plus peur.
Depuis 2018, cette ville de près de 20000 habitants fait parler d’elle à travers des assassinats à répétition. Le cas le plus emblématique est celui de la fillette albinos de cinq ans, Ramata Diarra, décapitée dans la nuit du 12 au 13 mai 2018. Auparavant, en avril de la même année, une femme handicapée mentale et sa fille d’à peine deux ans, ont été retrouvées égorgées dans leur famille. Ensuite, un autre, considéré également comme mentalement dérangé avait été retrouvé dans le même état au bord de la voie principale, qui relie Fana à Ségou.
Psychose
Ces différents crimes ont fini par installer une forme de psychose générale au sein de la population, qui a finalement décidé de montrer son mécontentement à travers une manifestation, le 14 mai 2018. Une manifestation qui s’est soldée par des arrestations, même si après quelques mois, la plupart des manifestants arrêtés ont été libérés. Ces protestations n’ont pas servi à grand-chose. En mars 2019 une autre femme, commerçante et sa fille ont été retrouvées décapitées dans leur domicile.
Les autorités maliennes ont alors décidé d’y instaurer un poste de police pour appuyer les efforts de la gendarmerie afin de renforcer davantage la sécurité dans la ville. Un poste qui a ouvert ses portes depuis le mois d’avril 2019. En collaboration avec la gendarmerie, les quelques agents de ce poste font des patrouilles dans la ville. Plusieurs arrestations ont été faites et des enquêtes sont en cours pour déterminer les auteurs ou les mobiles des récents événements tragiques, selon une source policière.
Nouveaux meurtres
Mais selon moi, ces efforts ne sont pas suffisants. En juillet 2019, Aminata Coulibaly, (dite « Lah »), a été attaquée jusque dans sa chambre par un jeune homme avec un couteau, alors que la jeune femme se trouvait en état de grossesse. Les mobiles de l’acte n’étaient pas encore déterminés, bien que le coupable ait reconnu les faits. Ce n’est pas tout : au cours du même mois, notamment le 24 juillet, une nouvelle victime mentalement dérangée a été retrouvée décapitée entre le campement et le marché de Fana.
Cette situation pèse lourd sur tous les responsables de la ville. « Fana est une ville cosmopolite parce qu’il existe des populations de plusieurs nationalités et de ce fait de cultures différentes », déclare un autre conseiller du chef de village pour expliquer la complexité de la sécurisation de cette ville-carrefour. En plus de cela, il me fait comprendre également qu’il s’agit d’une ville assez stratégique.
Un poste de police ne suffit pas
Contacté à ce sujet, l’officier délégué au poste de police de cette ville, le lieutenant de police, Assaleck Ag Amarizag, a déclaré qu’il approuve cette idée d’un commissariat. La requête a déjà été faite auprès de ses supérieurs hiérarchiques, qui ont promis l’implantation de ce commissariat. « Aujourd’hui, un poste de police ne suffit plus pour assurer la sécurité dans cette ville », explique-t-il en déclinant les dures conditions dans lesquelles lui et ses hommes travaillent, sans véhicule à leur disposition, ni de personnel en nombre suffisant.
Pourquoi jusque-là cette promesse d’installation n’arrive pas à se concrétiser ? « Il faut nécessairement ce commissariat qui contribuera sans nul doute à décharger un peu le commissaire divisionnaire de Dioïla qui est obligé de faire tous les jours, à chaque fois que le besoin se fait sentir, la navette entre Dioila et Fana, une quarantaine de kilomètre de distance », confie pourtant Ismaïla Traoré, commissaire divisionnaire à Dioïla.
Les autorités ont intérêt à regarder avec plus de pragmatisme la situation de cette ville située à 120 kilomètres de Bamako, la capitale malienne.