A Bouassa, l’orpaillage artisanal a le vent en poupe. Au détriment de l’école pour les enfants.
Nous sommes à Bouassa, à 85 km de la ville de Sikasso. Nous avons fait la rencontre de Boubacar et de Rokia, âgés respectivement de 15 et 10 ans. Ils sont tous deux confrontés au même problème. Si Rokia a la chance de continuer ses études, du moins pour le moment, Boubacar, lui, a quitté l’école.
Le visage ensablé, le corps robuste, Rokia n’a pourtant que 10 ans. Elle travaille sur ce site depuis une année déjà. Son travail consiste à laver les graviers. Ce qui lui permet de gagner souvent 2 500 francs par jour voire plus. Elle est consciente des dangers de ce travail qu’elle dit aimer.
Risque d’abandon
En revanche, Rokia dit aimer aussi les études. Intelligente, elle était toujours première de sa classe depuis son entrée à l’école. Actuellement en classe de 5e année, le niveau de Rokia semble avoir commencé à baisser faute de pouvoir suivre régulièrement les cours.
Sa mère, Fatoumata, déclare avoir fait l’objet de convocation de la part du directeur. Mais, elle affirme au moins ne pas mettre de pression sur ses enfants contrairement à certains parents : « Il y a certains parents qui poussent leurs enfants à venir travailler pour leur ramener de quoi pouvoir subvenir à leurs besoins. D’autres vont jusqu’à fixer un montant que les enfants doivent leur ramener le soir », raconte-t-elle. L’argent gagné par Rokia est gardé par sa mère et souvent utilisé pour acheter des moutons. « J’en ai actuellement deux en mon nom », affirme-t-elle.
Cependant, il faut signaler que certains enfants décident d’abandonner les études de leur plein gré : parce qu’ils gagnent mieux et veulent subvenir aux besoins de leurs parents.
Exploité par son tuteur
Le cas de Boubacar est inquiétant. Le garçon, âgé de 15 ans, vit avec son tuteur. Ses parents, qui travaillent ailleurs, l’ont placé dans une famille d’accueil. Boubacar gagne environ 4 000 francs CFA par jour. Il les remet à son tuteur. L’enfant aimait pourtant bien étudier : « J’étais souvent premier ou deuxième quand je fréquentais l’école », nous apprend-t-il. Mais sous l’autorité de son tuteur, Boubacar n’a plus remis les pieds dans la cour de l’école durant l’année scolaire écoulée. Cela, parce que ses parents n’ont pas pu payer les frais de scolarité. Le tuteur, lui, se sent moins concerné même si l’argent gagné par Boubacar lui est remis.
Sur le site, il aide ce dernier en transportant le minerai de la galerie jusqu’à un autre endroit. Ce travail n’est pas sans conséquences et Bouba, comme on le surnomme, le sait. « Le travail est trop dur. J’ai souvent mal à la poitrine et à la tête », confie-t-il. Puis, il s’emporte : « Il [son tuteur] me traite comme si je n’étais pas un être humain. »
Campagnes de sensibilisation sans résultat
Les autorités disent pourtant faire de leur mieux. Selon Youssouf Koné, président des orpailleurs locaux de Kolondiéba et conseiller à la mairie de Tiongui, ses organisations organisent régulièrement des activités de sensibilisation pour les parents sur l’importance de l’école pour les enfants. Souvent avec les autorités coutumières afin que les parents laissent les enfants aller à l’école.
Ces activités ne semblent pas donner les résultats escomptés. A Bouassa, les enfants se battent comme des adultes sur les sites d’orpaillage. Ils sont utilisés par certains parents pour rentabiliser leurs activités. D’autres, naïfs du fait de leur âge, croient que leur avenir est dans cette activité. L’avenir, dit-on, ce sont les enfants. A l’exemple de Bouassa, ceux qui sont sur les sites d’orpaillage n’auront pas la chance de préparer leur avenir si rien n’est fait.