Nous sommes le 8 mars, une journée qui nous rappelle sans aucun doute que les femmes– nos mères, nos sœurs et nos filles– ont des droits. C’est au cours du mois de mars que sont menées des actions de plaidoyer en faveur des droits de la femme.
J’ai toujours un sentiment mitigé quand on arrive le 8 mars. Face à un espoir et un engagement inébranlable pour arriver à une société juste et respectueuse des droits des femmes, les propos et discours que j’entends ressemblent souvent à ceux des années précédentes. Pire, j’ai parfois l’impression que nous avons passé 11 mois à nous battre pour les droits des femmes sans grand succès ou à constater, impuissants, leurs violations. Les chiffres, qui sont souvent présentés au niveau mondial sur les violations des droits de la femme, sont effroyables.
En Afrique, particulièrement au Mali, c’est encore plus grave. Nous vivons ces violations au quotidien, mais nous ne disposons toujours pas de données assez fiables pour en mesurer l’ampleur. Ce manque de données fiables entraine des prises de décisions souvent inefficaces. Évidemment, cette insuffisance ne saurait justifier les reculs flagrants et inacceptables sur le respect des droits humains.
Mauvaises interprétations coutumières ou religieuses
Les autorités maliennes tentent continuellement de faire des avancées en matière d’égalité des sexes et d’autonomisation des femmes et des filles. Malheureusement, dans un État défaillant et souvent dirigé par des leaders compromis, les mauvaises interprétations coutumières ou religieuses deviennent un boulet qui retarde la société dans son essor.
Les mobilisations contre la réforme du code des personnes de la famille en 2009, et les tirs de barrage essuyés récemment par l’avant-projet de loi sur le genre illustrent de façon éloquente à quel point certains acteurs de notre société sont en déphasage critique avec les principes de la laïcité et l’avènement d’une société équitable et égalitaire aux yeux de la loi.
Les femmes et les jeunes constituent le seul vrai moteur qui fait avancer nos sociétés. Aucune voix ne saura mieux les représenter que la leur. Femmes, jeunes, ceux et celles qui défendent vos droits, ONG ou activistes, ne sont que des soldats d’une armée dont vous êtes les seuls vrais généraux.
« Les droits des femmes sont des droits humains »
Le combat pour vos droits ne peut être gagné que si vous montrez la voie et dirigez cette armée avec courage et dans la solidarité. Battez-vous pour vos droits et ne laissez personne, sous aucun prétexte, les entraver ou freiner votre élan, car les droits des femmes sont des droits humains !
La Covid-19 a, sans aucun doute, eu un impact négatif sur la population en général. Cependant, les femmes sont celles qui souffrent plus durement de cette pandémie et de la façon dont elle est gérée par les États.
La crise sanitaire a induit une augmentation du niveau des violences domestiques et des abus sexuels. Ce qui est encore dramatique, c’est l’entretien du silence coupable des témoins et la frayeur des victimes de dénoncer les auteurs épouvantables. A cela, s’ajoutent les difficultés économiques qu’elles subissent du fait qu’elles travaillent principalement dans l’informel et qu’elles n’ont que de très faibles revenus. Elles ne peuvent pas, très souvent, respecter les mesures barrières et survivre économiquement.
L’État doit mettre en place des mesures et agir contre les inégalités de genre prétendument entretenues pour des motifs liés à la Covid-19. Il est impératif que l’État alloue les ressources nécessaires pour lutter contre les violences faites aux femmes dans le cadre des mesures prises pour lutter contre la pandémie.
Traiter de manière équitable et égale
L’État et ses partenaires doivent offrir et encourager des accompagnements économiques et sociaux aux femmes à tous les niveaux, qu’elles soient dans le formel ou dans l’informel, qu’elles soient ménagères, employées ou cheffes d’entreprise.
Face à une crise sanitaire qui aggrave les inégalités et les violences basées sur le genre, très souvent au détriment des femmes, il faut collecter des données sur le genre pour apporter des réponses adéquates à la crise et bâtir des plans de relance efficaces.
Les médias sont les principaux canaux par lesquels la société s’informe et s’éduque. Ils contribuent à façonner notre perception du modèle de société dans laquelle nous vivons. La sous représentativité et la sous-représentation des femmes dans les médias sont frustrantes et fortement dommageables aux femmes et aux médias eux-mêmes.
En effet, un media non inclusif des femmes et des hommes, dans leur diversité, est en violation des principes d’éthique, de déontologie et de professionnalisme sur lesquels se fondent le domaine. Les médias doivent être le fer de lance pour une société juste et respectueuse des droits humains. Les médias doivent représenter les femmes et les hommes de manière égale et dans toute leur diversité.
Notre société se portera mieux lorsque les droits des femmes seront compris et respectés par chacun. L’émergence et le développement harmonieux et durable de notre société nécessitent que les hommes et les femmes soient traités de manière équitable et égale.
- Tidiani Togola, ingénieur informaticien et spécialiste des TIC, est le directeur exécutif de la fondation Tuwindi.