Le président du Haut conseil islamique, Mahamoud Dicko et le chérif de Nioro, Bouyé Haïdara, ont appelé à une marche pacifique, le vendredi 5 avril, pour envoyer un message fort au président IBK (Ibrahim Boubacar Keïta) et son gouvernement. La marche, a expliqué le porte-parole de Mahmoud Dicko, Issa Kaou Djim, aura lieu sur la place de l’indépendance après la prière du vendredi. Selon le blogueur Issouf Koné, nous assistons à un bras de fer qui doit prendre fin.
L’appel a été lancé dans le sillage des massacres d’Ogossagou, qui en ont troublé plus d’un au sein de l’opinion nationale et internationale. Plus de 160 personnes ont été tuées. Le porte-parole du président du Haut conseil islamique, Issa Kaou Djim, ne mâche pas ses mots dans la vidéo d’appel à la mobilisation : « Le but de la manifestation est d’envoyer un dernier message à IBK (Ibrahim Boubacar Keïta, ndlr). Pas au Premier ministre mais au président lui-même. Nous lui ferons savoir que le Mali a un président autre que lui ». Des propos qui sont révélateurs de quelque chose d’assez inquiétant : la défiance de Mahmoud Dicko vis-à-vis du pouvoir.
C’est vrai que nous sommes en avril et que les blagues, en ce mois-ci, sont une tradition. Cette fois-ci, cependant, vu le contexte dans lequel nous sommes – l’insécurité grandissante, le terrorisme, les grèves, les tueries dans le Centre avec l’évènement tragique d’Ogossagou – , nous pouvons penser à tout sauf un poisson d’avril.
Négligence chronique
Il importe de rappeler que ce n’est pas la première fois que le HCI organise des mobilisations d’envergure. La dernière en date en date remonte au 10 février 2019, qui était consacrée à une prière collective pour le Mali, au Stade-26 mars où le chérif de Nioro, Mohamed Ould Cheicknè, dit « Bouyé », avait, par la voix de son émissaire, demander la démission du Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maiga. La marche de ce vendredi, 5 avril, tout comme la mobilisation du 10 février dernier, aura lieu même sans autorisation, a fait savoir le président du HCI.
Les regards entre « chien et chat » que se renvoient le gouvernement malien et le Haut conseil islamique, notamment son président, depuis un certain moment, est connu de tous. J’estime que le régime en place fait preuve d’une négligence chronique sur le plan de la gouvernance. Cette négligence se répercute sur tous les secteurs et, plus particulièrement, les secteurs éducatifs et sécuritaires. Par conséquent, j’encourage toute action capable de lui mettre la pression afin qu’il se remettre au travail. Même si je déplore la stratégie du HCI que je trouve personnellement un peu déplacée.
Bras de fer
Pourquoi préciser que le message du 5 avril n’est pas adressé au Premier ministre ? Pourquoi se focaliser autant sur une personne depuis un certain temps comme si c’était elle le problème? De son côté, le gouvernement, visiblement, ne semble pas être sous l’effet de la pression et semble percevoir cette marche que Issa Kaou Djim qualifie d’ultimatum comme un poisson d’avril.
Il est clair qu’entre le Premier ministre et ces deux leaders religieux, ça n’a jamais été le grand amour : la sortie du Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga, qui avait déclaré suite à l’affaire des 50 millions refusés que les leaders religieux poursuivent le même objectif politique qu’eux, n’a rien arrangé. Dans le fond, tout cela laisse entrevoir un bras entre un pouvoir qui semble faible et un Haut conseil islamique un peu trop ancré dans la politique pour refléter la crédibilité que recherchent les religieux. Et qui sait ce qu’il pèse désormais : beaucoup.